Le Champagne

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En 2015 trois sites de la Champagne étaient inscrits officiellement sur la liste du Patrimoine Mondial de l’Unesco dans la catégorie Paysage culturel,: l’avenue de Champagne à Epernay, la colline Saint-Nicaise à Reims et les coteaux historiques autour d’Epernay. Une reconnaissance universelle pour le plus connu des vins effervescents dans le monde !

Epernay, Avenue de Champagne, l’un des 3 sites de la Champagne inscrits sur la liste du Patrimoine Mondial de l’Unesco en juillet 2015

Dom Pérignon, cellérier de l’abbaye d’Hautvillers n’a pas inventé la mousse au XVIIe siècle comme on le croit ; il a su par contre en excellent technicien et grâce à une sévère sélection de cépages améliorer la qualité. Le champagne lui doit l’une de ses règles d’or, les assemblages de raisins. Aujourd’hui, sous une appellation unique, il existe une multitude de champagne. De par le monde ce vin fut souvent imité, au nom galvaudé, mais jamais surpassé. Doit-on rappeler que Champagne est le deuxième mot français le plus connu dans le monde (après bonjour) !

Le Champagne a établi 6 règles principales :

  • Emploi des cépages suivants : chardonnay, pinot noir, pinot meunier (voir plus bas les cépages secondaires autorisés) ;
  • Taille courte (principalement Royat, Chablis, Guyot) ;
  • Rendement maximum en raisins à l’hectare (en kg/ha) décidé chaque année par l’lnterprofession ;
  • Rendement maximum au pressurage de 102 litres pour 160 kilos de raisins ;
  • Degré minimum fixé chaque année ;
  • Conservation en bouteille pendant quinze mois minimum avant expédition, 36 mois pour les millésimes.

I – Les six catégories de Champagne

Sous l’appellation Champagne blanc et rosé existent six catégories dont la mention figure sur l’étiquette :

  • Champagne Millésimé : vins effervescents blancs et rosés
  • Champagne Cuvée Spéciale de Prestige: vins effervescents blancs et rosés
  • Champagne Blanc de Blancs : vin effervescent blanc
  • Champagne Blanc de Noirs : vin effervescent blanc
  • Champagne Rosé : vin effervescent rosé
  • Crémant de Champagne : vin effervescent blanc

A cela s’ajoutent 8 spécificités de goût selon le dosage en sucre, une quantité de sucre ajoutée qui permet d’élaborer les différents niveaux de goût, plus ou moins dosés, c’est-à-dire plus ou moins sucrés, définis dans l’Union européenne.

  • extra-Brut(entre 0 et 6 g/l de sucre)
  • brut nature(moins de 3 g/l)
  • brut(moins de 15 g/l en sucre)
  • extra-dry(de 12 à 20 g/l)
  • sec(dry) (de 17 à 35 g/l)
  • demi-sec(de 33 à 50 g/)
  • doux(plus de 50 g/l)

Pour une teneur de moins de 3 grammes, on peut également utiliser les mentions :

  • brut nature,
  • pas dosé,
  • dosage zéro
  • Les autres appellations champenoises

Enfin, à cette longue liste de vins effervescents, il convient d’ajouter les deux vins tranquilles de Champagne (non effervescents) :

  • Les Coteaux champenois(vins rouges, rosés, blancs)
  • Le Rosé des Riceys (vin rosé).

II – Les cépages du Champagne

  • pinot noir(40 % du vignoble) pour sa puissance, aux arômes de fruits rouges. C’est le premier cépage champenois avec 13 044 ha et premier vignoble de pinot noir dans le monde (avant la Bourgogne).
  • pinot meunier(34 % du vignoble) pour sa souplesse et son fruité.
  • chardonnay(26 % du vignoble) pour la finesse de ses notes florales. Seul, il sert à élaborer le Champagne Blanc de Blancs.

A ces trois cépages qui dominent le Champagne, il existe un complément d’âme apporté par d’autres cépages. Ils furent volontairement estompés pour réapparaître bien timidement aujourd’hui. Ce sont quatre cépages blancs :

  • l’arbane,
  • le petit meslier
  • le pinot blanc,
  • le pinot gris

Ils sont autorisés mais représentent aujourd’hui moins de 0,5 % du vignoble. Autorisés sans doute mais pas en plantation nouvelle, que sur des droits d’arrachage ! Le CIVC (Comité Interprofessionnel des Vins de Champagne) veille au grain.

III – Le vignoble champenois

Carte de la Champagne viticole – © Editions Belin / Stéphane Plet

La superficie du vignoble champenois déclaré en AOC se monte à 33 500 ha dont près de 21 000 ha sur le seul département de la Marne. Il doit sa richesse à son morcellement ; chaque village constitue un cru (le produit d’un terroir et d’un climat). Il faut se rappeler que le vignoble de la Champagne est ancien et historiquement très vaste. En 1865, il s’étendait sur 65.000 ha. L’apparition du phylloxéra, à la fin du XIXe siècle puis, la guerre de 1914-18 vont en réduire considérablement la surface, celle-ci représentant environ 12 000 ha à la fin d’un conflit dévastateur pour la Champagne. Mais dès 1927, la Champagne a été la première région française à fixer les limites de sa zone d’appellation. Celle-ci est encore aujourd’hui morcelée et s’étend principalement sur les départements de la Marne (72 % des surfaces en production) et de l’Aube (21 %), avec 5 régions principales (Montagne de Reims, Côte des Blancs,Vallée de la Marne, Côte de Sézanne et Côte des Bar) ainsi que sur quelques communes de l’Aisne, de la Haute Marne et de la Seine et Marne soit 319 communes (voir la liste plus bas).

Les cinq régions de la zone d’appellation :

  • Montagne et Val de Reims: des coteaux entre le plateau et la vallée de l’Ardre et de la Vesle exposés au sud avec comme cépages dominants, pinot noir et pinot meunier.
  • Vallée de la Marne: des coteaux qui d’Aÿ jusque dans l’Aisne au-delà de Château-Thierry sont à prédominance argilo-calcaire avec le pinot meunier comme cépage dominant (62 %).
  • Côte des Blancs et Sézannais,royaume du chardonnay (82 %). La craie y est omniprésente. Les coteaux relient du nord au sud Épernay aux coteaux du Sézannais.
  • Côte des Barentre Seine et Aube, au sud de la Champagne. Sur des sols crayeux à tendance marneuse, le pinot noir domine (87 %).

 

IV – Un classement en trois catégories

Le vignoble champenois est classé en 3 catégories. Il comprend 320 villages sachant que chaque village est considéré comme un cru.

Première catégorie : 17 villages classés Grands Cru

Ces 17 villages sont tous situés dans le département de la Marne. Seuls les propriétaires ayant la totalité de leurs vignes dans un ou plusieurs villages grands crus peuvent mentionner Grand Cru sur l’étiquette de leurs bouteilles. Ce classement est fondé sur des critères de sous-sols, de pente et d’exposition.

§  Ambonnay,

§  Avize,

§  Aÿ,

§  Beaumont-sur-Vesle,

§  Bouzy,

§  Chouilly,

§  Cramant,

§  Louvois,

§  Mailly-Champagne,

§  Le Mesnil-sur-Oger,

§  Oger,

§  Oiry,

§  Puisieulx,

§  Sillery,

§  Tours-sur-Marne,

§  Verzenay,

§  Verzy

Deuxième catégorie : 44 villages classés Premiers Crus

§  Avenay,

§  Bergères-les-Vertus,

§  Bezannes,

§  Billy le Grand,

§  Bisseuil,

§  Chamery,

§  Champillon,

§  Chigny les Roses,

§  Chouilly (pinot noir),

§  Coligny (chardonnay),

§  Cormontreuil,

§  Coulommes la Montagne,

§  Cuis,

§  Cumières,

§  Dizy,

§  Ecueil,

§  Etrechy (chardonnay),

§  Grauves,

§  Hautvillers,

§  Jouy les Reims,

§  Les Mesneus,

§  Ludes,

§  Mareuil sur Aÿ,

§  Montbré,

§  Mutigny,

§  Pargny les Reims,

§  Pierry,

§  Rilly la Montagne,

§  Sacy,

§  Sermiers,

§  Taissy,

§  Tauxières,

§  Tours-sur-Marne (chardonnay),

§  Trépail,

§  Trois Puits,

§  Vaudemanges,

§  Vertus,

§  Villedommange,

§  Villeneuve Renneville,

§  Villers Allerand,

§  Villers aux Noeuds,

§  Villers Marmery,

§  Voipreux,

§  Vrigny

 

Troisième catégorie

Elle regroupe tous les autres, les 255 villages restants sur 25 000 ha. Ils ont droit à l’appellation Seconds Crus qui est très peu peu utilisée.

V – Une brève histoire du Champagne

La culture de la vigne remonte en Champagne à l’époque gallo-romaine. Jusqu’au XVIIe siècle, on appréciait ces vins gris faiblement colorés mais qui vieillissaient mal en fûts. Pour en conserver les arômes, ils étaient mis en bouteilles très tôt. Il en résulta que ces vins ayant peu d’alcool et dont le tirage était fait à l’équinoxe de printemps devinrent naturellement pétillants. Les vignerons les appelaient Vin du diable ou saute-bouchon à cause des bouteilles qui explosaient ou des bouchons qui sautaient.

L’apport de Dom Pérignon

Eglise abbatiale d’Hautvillers (ancienne abbatiale Saint-Pierre), au pied du tombeau de Dom Pérignon

Impossible d’évoquer le Champagne sans citer dom Pérignon (1639-1715), moine cellérier de l’abbaye d’Hautvillers qui, l’un des premiers, décida de tirer parti de la refermentation printanière spontanée jusqu’alors considérée comme une calamité. Il préconisa tout à la fois :

  • L’assemblage de raisins provenant de terroirs différents pour marier leurs qualités
  • Le pressurage rapide et fractionné des raisins noirs majoritaires en Champagne pour en extraire un jus blanc
  • L’utilisation des premières bouteilles en verre épais et résistant
  • Le remplacement des anciens bouchons de bois et d’étoupe par un bouchon de liège maintenu par une ficelle, afin de contenir la mousse
  • Le creusement de caves en pleine craie pour assurer le vieillissement des vins à température constante.

Le champagne lui doit ainsi l’une de ses règles d’or : les assemblages de raisins. Il pratiqua avec talent les soutirages et les collages, réussissant à stabiliser les vins et à garder leur mousse. Ensuite, tout s’accélère avec la fondation des grandes maisons :

Les grandes étapes vers le Champagne « moderne »

1804 : premier Champagne Rosé lancé par Mme Clicquot

1830 : premières étiquettes collées sur les bouteilles

1860 : premier Brut promu par Mme Pommery. Mais il faut attendre…

1870 : année de défaite, pour voir apparaître les premiers Champagne Millésimés.

VI – Comment élabore-t-on le Champagne ou la fameuse méthode champenoise ?

Les différentes étapes :

1 – les vendanges :

Elles sont exclusivement manuelles pour recueillir des grappes intactes.

2 – le pressurage :

Il est strictement réglementé par l’appellation. Le pressurage est effectué très rapidement après la cueillette des raisins, afin qu’ils ne s’altèrent pas et pour éviter que la peau du raisin ne teinte le jus.

3 -la vinification :

La première fermentation alcoolique se fait à basse température en octobre, généralement dans des cuves inox thermorégulées, par cépages, crus et cuvées. Cette fermentation donne un vin tranquille, fruité et sec, doté d’une légère acidité. Elle est parfois suivie par une fermentation malolactique qui donne au vin souplesse et rondeur.

4 -l'assemblage :

C’est l’étape fondatrice de chaque cuvée. Le chef de Maison et son œnologue marient les vins tranquilles de différents crus et années pour perpétuer le style et la qualité constante de la maison. Lors de grandes années on crée des "millésimes" issus d'assemblages des récoltes de l'année.

5 – le tirage ou mise en bouteilles :

Sucre et levures sont ensuite ajoutés à l’assemblage préparé selon les proportions choisies. Il suffit de 4 grammes de sucre par litre pour obtenir une pression de 1 kg par cm2, soit une atmosphère dans la bouteille. La réglementation champenoise exige au minimum 5 bars à la commercialisation.

6 – la prise de mousse :

En 4 à 6 semaines, sous l’action des levures et à basse température dans les caves (9 à 11°), la deuxième fermentation en bouteille rend le vin effervescent.

7 – la maturation sur lies :

Le vieillissement permet aux cuvées de développer leurs arômes spécifiques. Il est obligatoirement de 15 mois minimum après tirage et 3 ans pour les Champagne millésimés. Ce sont évidemment des minima. Ces durées sont largement dépassées pour les cuvées de qualité. On dit alors des bouteilles qu’elles sont rangées sur lattes.

8 – le remuage :

un geste ancestral qui permet de faire descendre progressivement le dépôt de levures dans le col pour pouvoir l’expulser, après congélation du col, lors du dégorgement. Longtemps manuel, il est aujourd’hui principalement assuré par des automates.

9 – le dosage : il permet, par l’adjonction au vin d’une petite quantité de liqueur de dosage, de restituer à la cuvée un niveau de sucre habituel dans les vins. C’est par le niveau de dosage que se différencient Brut, Extra Brut, Sec, Demi-Sec.

La bouteille sera ensuite fermée hermétiquement par un bouchon de liège, coiffée d’une plaque de muselet (au couleurs de la maison) et l’ensemble retenu par un muselet en fer.

10 – l’habillage

il se fait par la pose d’une étiquette et d’un col porteurs d’image. L’habillage doit se conformer aux nombreuses règles de l’AOC et souvent aussi aux obligations propres des pays importateurs. Ainsi, l’étiquette comporte un certain nombre d’informations qui donnent au consommateur des éléments sur le type de Champagne et la façon dont il a été fabriqué.

Quelques spécificités au Champagne

La Champagne évalue traditionnellement la récolte en tonnes de raisins, en pièces de jus non fermenté et en cols de bouteille, en distinguant les bouteilles vendues annuellement et les stocks, alors que partout ailleurs la tendance est à compter en hectolitres. La production annuelle est ainsi estimée à 320 millions de bouteilles, avec des stocks de 1,2 milliard de bouteilles. Avec l’augmentation du rendement qui peut aller jusqu’à 14 000 kg/ha (aujourd’hui, 10500 kg/ha) les perspectives de production annuelle peuvent monter à près de 400 millions de cols.

Mathus dit Jean Vérot