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À quoi pourrait ressembler la Terre dans 200 millions d’années ?

Par Mattias GREEN, Hannah Sophia DAVIES, et Joao C. DUARTE

Dans l’espace, lorsque les plaques tectoniques se rassemblent, elles forment un supercontinent qui perdure quelques centaines de millions d’années avant de se briser. Le prochain devrait se former d’ici 200 à 250 millions d’années. Voici les quatre scénarios possibles.

La couche extérieure de la Terre, la croûte solide sur laquelle nous marchons, est constituée de morceaux brisés, un peu comme la coquille d’un œuf cassé. Ces morceaux, les plaques tectoniques, se déplacent autour de la planète à une vitesse de quelques centimètres par an. De temps en temps, les plaques se rassemblent et se combinent pour former un supercontinent, qui perdure quelques centaines de millions d’années avant de se briser. Puis les plaques se dispersent et s’éloignent les unes des autres, jusqu’à ce qu’elles finissent par se réunir à nouveau – après quelque 400 à 600 millions d’années.

Le dernier supercontinent, la Pangée, s’est formé il y a environ 310 millions d’années et a commencé à se désassembler il y a environ 180 millions d’années. Il a été suggéré que le prochain supercontinent se formera dans 200-250 millions d’années. Nous sommes donc actuellement à peu près au milieu du cycle d’assemblage et dispersion du supercontinent. La question est la suivante : comment le prochain supercontinent se formera-t-il et pourquoi ?

Il existe quatre scénarios fondamentaux pour la formation du prochain supercontinent : la nouvelle Pangée, la Pangée ultime, Aurica et Amasia. La formation de ces quatre supercontinents potentiels est en fait liée à la façon dont la Pangée s’est séparée et dont les continents du monde se déplacent encore aujourd’hui.

L’éclatement de la Pangée a conduit à la formation de l’océan Atlantique, qui s’ouvre et s’élargit encore aujourd’hui. De l’autre côté, l’océan Pacifique se ferme et se rétrécit. Tout autour de l’océan Pacifique se trouve la célèbre ceinture de feu du Pacifique, où le fond océanique descend par subduction sous les plaques continentales et plonge dans l’intérieur de la Terre. Là, les anciens fonds océaniques sont « recyclés » et peuvent se transformer en panaches volcaniques. L’Atlantique, en revanche, possède une grande dorsale océanique qui produit une nouvelle plaque océanique, mais n’abrite que deux zones de subduction : l’arc des Petites Antilles dans les Caraïbes et l’arc des Antilles australes, situé entre l’Amérique du Sud et l’Antarctique.

1. La nouvelle Pangée

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Si nous supposons que les conditions actuelles persistent, de sorte que l’Atlantique continue à s’ouvrir et le Pacifique à se fermer, nous avons un scénario dans lequel le prochain supercontinent se forme aux antipodes de la Pangée. Les Amériques entreraient en collision avec l’Antarctique, qui dérive vers le nord, puis avec l’Afrique-Eurasie, deux plaques déjà en collision. Le supercontinent qui se formerait s’appelle « nouvelle Pangée », ou Novopangea.

2. La Pangée ultime

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L’ouverture de l’Atlantique pourrait toutefois ralentir, voire même s’inverser, et l’Atlantique commencer à se fermer, tandis que les deux petits arcs de subduction dans l’Atlantique s’étendraient tout le long de la côte est des Amériques Sud et Nord. Ceci entraînerait une recréation de la Pangée : les Amériques, l’Europe et l’Afrique seraient réunies en un supercontinent appelé la Pangée ultime. Ce nouveau supercontinent serait entouré par un océan Pacifique géant.

3. Aurica

Cependant, si l’Atlantique devait développer de nouvelles zones de subduction – ce qui est peut-être déjà le cas – les océans Pacifique et Atlantique pourraient tous deux être condamnés à se fermer. Cela signifie qu’un nouveau bassin océanique devrait se former pour les remplacer.

Dans ce scénario, le rift pan-asiatique, qui traverse actuellement l’Asie depuis l’ouest de l’Inde jusqu’à l’Arctique, s’ouvrirait pour former un nouvel océan et former le supercontinent Aurica. L’Australie, qui dérive actuellement vers le nord, serait au centre du nouveau continent, alors que l’Asie de l’Est et les Amériques fermeraient le Pacifique de chaque côté. Les plaques européenne et africaine rejoindraient alors les Amériques à la fermeture de l’Atlantique.

4. Amasia

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Le destin de la Terre est complètement différent dans le quatrième scénario. Celui part de l’observation, bien réelle que plusieurs des plaques tectoniques se déplacent actuellement vers le nord, notamment l’Afrique et l’Australie. Cette dérive serait due à des anomalies laissées par la Pangée dans les profondeurs de l’intérieur de la Terre, dans la partie appelée manteau. En raison de cette dérive vers le nord, on peut envisager un scénario dans lequel les continents, à l’exception de l’Antarctique, continueraient à dériver et finiraient par se rassembler autour du pôle Nord en un supercontinent appelé Amasia. Dans ce scénario, l’Atlantique et le Pacifique resteraient en grande partie ouverts.

Penser à l’avenir

De ces quatre scénarios, nous pensons que la nouvelle Pangée est le plus probable. Il s’agit d’une progression logique des directions actuelles de la dérive des plaques continentales, tandis que les trois autres supposent qu’un autre processus entre en jeu. Il faudrait de nouvelles zones de subduction atlantique pour Aurica, le renversement de l’ouverture atlantique pour la Pangée ultime, ou des anomalies à l’intérieur de la Terre laissées par la Pangée pour Amasia.

L’étude de l’avenir tectonique de la Terre nous oblige à repousser les limites de nos connaissances et à réfléchir aux processus qui façonnent notre planète sur de longues échelles de temps. Elle nous amène également à réfléchir sur le système terrestre dans son ensemble et soulève une série de questions : quel sera le climat du prochain supercontinent ? Comment la circulation océanique s’adaptera-t-elle ? Comment la vie évoluera-t-elle et s’adaptera-t-elle ? Ce genre de questions repoussent les limites de la science parce qu’elles repoussent les limites de notre imagination.

Par Mattias GREEN, maître de conférences en océanographie physique, Université de Bangor (Royaume-Uni), Hannah Sophia DAVIES, chercheuse PhD, Université de Lisbonne (Portugal) et Joao C. DUARTE, chercheur et coordinateur du groupe de géologie et géophysique marines, Université de Lisbonne (Portugal)

La version originale de cet article a été publiée dans The Conversation.

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