SUDOUEST ECO du 11/07/2017
C’est un pari, qui en dit long sur les mutations de l’enseignement supérieur aujourd’hui. Pour mieux s’adapter aux besoins de l’entreprise et des étudiants, l’Ensam vient de lancer une école de l’innovation et de l’entrepreneuriat, avec des experts issus de toute la France
C’est un signe que l’enseignement supérieur est en pleine évolution. L’Ecole Nationale Supérieure d’Arts et Métiers (Ensam), “grande école”, qui a formé plus de 85 000 ingénieurs depuis sa création en 1780, propose depuis quelques jours un tout nouveau cursus, totalement atypique, à ses étudiants : l’école de l’innovation et de l’entrepreneuriat.
Une école sur-mesure pour des étudiants-entrepreneurs
Une école, où les élèves et les professeurs ne se voient pas tous les jours et qui n’a pas de bâtiments propres. Le concept peut surprendre, mais son créateur, Philippe Viot, jusque-là directeur de l’Ensam Bordeaux, l’a conçu sur-mesure par rapport aux besoins des étudiants et de l’entreprise, à l’heure de l’industrie 4.0 et de la révolution numérique. “J’ai constaté les limites de notre modèle actuel, réalisé un rapport de 70 pages sur le sujet et cette proposition a été retenue par ma direction”, précise-t-il.
“Le choix des modules est libre : robotique, réalité virtuelle, chaîne numérique… et n’est plus lié à une obligation de s’implanter géographiquement dans une ville. En clair, si un étudiant de Bordeaux s’intéresse à la robotique, il n’a plus besoin de partir à Arts et métiers à Lille“, explique Philippe Viot. “Ceci casse les obstacles spatiaux et coûte moins cher à l’étudiant et à l’école”, avance-t-il.
Cap Sciences, Bordeaux Unitec, l’UIMM et la Région, partenaires du projet
Concrètement, étudiants et experts se retrouvent toutes les six semaines pour des séminaires, où ils apprennent à gérer leur business, leur plan de communication… Une partie du travail se fera à distance, en salle de réunion “virtuelle”. Le reste du temps, les étudiants travaillent sur leur projet d’entreprise et sont hébergés dans des pépinières. Ici, à Bordeaux, ils sont accueillis à Bordeaux Unitec et Cap Sciences. Le Centre de formation d’apprentis de la région, l’UIMM et la Région sont également partenaires du projet.
Pour l’heure, l’école compte 12 étudiants (de Bordeaux, Angers, Paris, Cluny…) et 11 professeurs-experts issus des différents campus de l’Ensam en France, ainsi que 5 coachs pour les aider à faire émerger leur entreprise. Tous les élèves sont issus d’Arts et Métiers – qui finance le projet – et ont, au moins, validé leur première année. Le premier séminaire s’est déroulé le 7 septembre à Cap Sciences à Bordeaux. Au total, l’enseignement dispensé est de 1 420 heures sur l’année scolaire, dont 120 heures de séminaire et 600 heures dédiées au projet personnel. A noter, que les frais de scolarité sont les mêmes que pour les autres étudiants de l’Ensam, à savoir ceux d’une école publique.
Quel diplôme ?
Reste la question du diplôme. Pour l’instant, les 12 étudiants de la première promotion ont accepté de faire une année de césure pour ce projet, mais ils reviendront à la rentrée prochaine en 2e année à Arts et Métiers. Ceci étant, ils vont acquérir avec cette école de l’innovation des certifications de qualifications délivrées par l’Afpi (Association de formation professionnelle de l’industrie). “Nous soutenons pleinement cette école, qui met l’accent sur une pédagogie, très axée sur le travail collaboratif, qui est de plus en plus recherchée dans l’industrie”, souligne Laurent Adam, directeur du pôle formation de l’UIMM dans la région.
“Ce qui me plaît, c’est que cette école nous permet nous investir pleinement dans notre projet entrepreneurial. En outre, cette école mélange théorie et pratique”, explique Ivan, 22 ans, qui a déjà créé sa propre imprimante 3D.
“Pour nous, c’est le meilleur moyen d’accompagner les étudiants sur leurs projets professionnels. Et, la relation avec eux est moins verticale”, se réjouit Nicolas Perry, enseignant-chercheur à l’Ensam de Bordeaux.