La Rochefoucaud-Liancourt
François-Alexandre-Frédéric, duc de Liancourt puis duc de la Rochefoucauld-Liancourt, né le 11 janvier 1747, mort le 27 mars 1827, a été le fondateur d’une institution qui a donné naissance aux écoles d’arts et métiers, et, plus tard, l’un des propagateurs de l’enseignement mutuel en France.
La Rochefoucauld-Liancourt débuta comme militaire dans le corps des carabiniers. Son père, le duc d’Estissac, qui occupait auprès du roi Louis XV les fonctions de grand-maître de la garde-robe, le fit admettre, suivant la coutume du temps, dès l’âge de vingt et un ans, à la survivance de sa charge ; mais déjà à cette époque le jeune duc de Liancourt se montra peu courtisan. Accueilli comme un fils par le duc de Choiseul, il lui resta fidèle après sa disgrâce, ne consentit jamais à paraître chez Mme Du Barry, et se montra rarement à Versailles, « où le roi, a écrit son fils, lui montrait un visage sévère et mécontent». Aussi comprend-on sans peine les sévérités, très piquantes d’ailleurs, d’une relation de « la dernière maladie de Louis XV », que Sainte-Beuve lui attribue.
Comme Paris l’ennuyait et Versailles plus encore, il s’attacha à sa terre de Liancourt en Beauvaisis, qui avait passé, au dix septième siècle, de la maison du Plessis de la Roche-Guyon dans celle de La Rochefoucauld, par le mariage de Mlle de la Roche-Guyon, petite-fille de la duchesse de Liancourt — voir Liancourt (Mme de)— avec le duc François de La Rochefoucauld. Il mit à profit les enseignements agricoles qu’il avait reçus dans plusieurs voyages en Angleterre, et établit à Liancourt une ferme à la façon anglaise. Il fut ainsi le premier à propager en France la culture des prairies artificielles, pour détruire le système des jachères ; il importa de Suisse et d’Angleterre de belles races de bestiaux. D’un autre côte, il changea une ferme qu’il possédait en haut de la montagne de Liancourt « en une école d’instruction dans les arts et métiers pour les fils pauvres des militaires » : ce sont les termes dont se sert, pour caractériser celte institution, la notice biographique publiée sur La Rochefoucauld-Liancourt par son fils. « Dans cette école, destinée d’abord aux enfants de son régiment, et qui bientôt — dit Ph. Pompée (Rapport du Jury international, 1867, enseignement technique, industrie) — se grossit d’enfants de régiments dont les colonels étaient les amis du duc de Liancourt, deux sous-officiers apprenaient à quatre-vingts élèves environ à lire, à écrire et à calculer. En outre, on y formait ceux qui le voulaient aux métiers utiles dans les régiments, comme ceux de tailleur, de cordonnier, d’armurier. » Le duc se plaisait dans cette école, appelée Ecole des enfants de l’armée ; il se promenait souvent au milieu des enfants appliqués à divers travaux, applaudissait aux succès des meilleurs, pressait les paresseux, et disait souvent à chacun d’eux : « Souviens-toi, mon enfant, que, lorsque tu sauras ton métier, ta fortune sera faite ».
Avec Louis XVI, le duc de Liancourt retrouva un peu de la légitime faveur que méritait son caractère ; en 1786, il accompagna le roi dans un voyage en Normandie, qui aurait dû, à ce moment, ouvrir les yeux au souverain sur les besoins et sur les sentiments de la France. Lorsqu’éclata la Révolution, le duc de Liancourt se trouva, pour ainsi dire, de plain pied avec les événements, « homme de 8y, dit Sainte-Beuve, tel qu’il s’en préparait à cette époque dans tous les rangs, et particulièrement au sein de la jeune noblesse éclairée et généreuse ». Il fut député de son ordre pour le bailliage de Clermont-en-Beauvaisis, et vota à l’Assemblée constituante toutes les mesures libérales que pouvait admettre un ami personnel du roi. Ce fut lui qui, grâce à sa charge de grand-maître de la garde-robe, pénétrant jusqu’à Louis XVI dans la nuit du 12 au 13 juillet, le faisait réveiller pour lui apprendre les mouvements populaires, et, lui entendant dire comme première parole : « Mais c’est donc une révolte? » lui répondit ce mot si connu : « Non, sire, c’est une révolution ». Le 18 juillet, le duc de Liancourt fut porté à la présidence de l’Assemblée nationale. Il avait déjà publié ou il publia à cette époque plusieurs travaux de politique financière et d’économie sociale: un mémoire ayant pour titre Finances et crédit, une Notice sur l’impôt territorial foncier en Angleterre, des rapports à l’Assemblée nationale sur la mendicité, sur l’état des hôpitaux et des prisons du royaume, sur la formation d’ateliers de secours pour les indigents, etc. Il s’opposa de toutes ses forces à la loi contre les émigrés, qui n’en fut pas moins adoptée ; il parla en faveur de la liberté de conscience et de la liberté individuelle ; le premier, il proposa l’abolition du supplice de la corde. En même temps, il faisait construire à Liancourt de vastes ateliers, et, en 1790, il y établit une filature mécanique de coton d’après les procédés irlandais.
Après la séparation de l’Assemblée constituante, le duc de Liancourt, nommé lieutenant général des armées du roi, fut chargé du gouvernement de la Normandie et de la Picardie, et sut y maintenir la tranquillité.
Quelques semaines avant le 10 août, il avait engagé le roi à se retirer à Rouen, d’où, en cas de revers, une retraite par mer était facile ; mais la cour n’ayant pas accepté ses offres, il mit du moins à la disposition de Louis XVI une somme de 150000 livres, le plus clair de sa fortune. Lui-même, d’ailleurs, dut bientôt songer à sa propre sûreté. Un bateau de pêche le transporta du Crotoy en Angleterre, tandis qu’en passant à Gisors son cousin La Rochefoucauld d’Enville était massacré à coups de pierres, sous les yeux de sa mère et de sa femme (14 septembre 1792). L’agriculteur Arthur Young accueillit le duc de Liancourt à Bury-Saint-Edmunds. Ses ressources étaient fort restreintes, lorsqu’une vieille demoiselle, qui ne le connaissait que de réputation, lui légua toute sa fortune : le duc ne l’accepta que pour la remettre aux héritiers naturels de la donatrice. Quand le roi fut mis en jugement, il écrivit à Barère, président de la Convention, pour demander la permission de venir rendre témoignage dans le procès. Barère, qui lui voulait du bien, ne fit pas mention de cette lettre.
D’Angleterre, le duc de La Rochefoucauld (il avait pris ce titre depuis la mort de son cousin) passa aux Etats-Unis, qu’il parcourut en observateur sérieux : son Voyage, qu’il publia en 1800. renferme un intéressant tableau de la république américaine et du Canada à la fin du dix-huitième siècle. Vers cette époque, le comte de Provence de futur Louis XVIII), du fond de sa retraite, lui écrivit pour lui redemander, comme s’il eût été déjà sur le trône, la charge de grand-maître de la garde-robe, que le duc d’Estissac avait payée 400000 livres : La Rochefoucauld refusa, et ce fut là sans doute l’origine d’une défaveur qui se manifesta plus tard jusqu’à l’injustice pendant la Restauration.
Dès 1799, avant qu’une loi eût autorisé le retour des émigrés, La Rochefoucauld était revenu se cacher à Paris, où Talleyrand le couvrit de sa protection. Il y apportait l’idée de répandre la vaccine et, « comme ses biens, dit son fils, avaient été vendus en majeure partie, et que le reste était encore confisqué, il emprunta les fonds qui lui étaient nécessaires pour se mettre à la tête d’une souscription à l’effet de commencer des expériences sur les effets de ce préservatif, et de le propager aussitôt qu’on se serait assuré de son efficacité. Le résultat a été admirable, continue le biographe ; M. Charles Dupin nous a rappelé en 1827, aux obsèques du philanthrope, que seize millions d’individus ont été vaccinés, et qu’en raison du huitième que la petite vérole enlevait autrefois, on pouvait dire que le duc de La Rochefoucauld avait sauvé d’une mort précoce deux millions d’hommes. » Lorsque sa radiation de la liste des émigrés eut été prononcée, le duc de La Rochefoucauld établit, un comité chargé de propager la vaccine : il en fut nommé président perpétuel. Il créa en même temps, au moyen d’une souscription, l’utile institution des dispensaires, qui consiste à faire traiter à domicile les indigents malades par des médecins attachés à chaque établissement.
Liancourt lui fut rendu à cette époque. L’Ecole des enfants de l’armée avait été, après l’émigration du duc en 1792, adoptée par la Convention ; en l’an III, on y avait réuni les élèves de l’école de Popincourt, fondée par le chevalier Paulet en 1772 et abandonnée par son fondateur en 1792, et ceux de la Société des Jeunes Français, dont le directeur, Léonard Bourdon, avait été arrêté à la suite de la journée du 12 germinal. Crouzet, ancien principal du collège du Panthéon français, avait été mis à la tête de cette institution. Déjà, quand, le 2 brumaire an III, la Convention avait licencié l’Ecole de Mars, quelques élèves de bonne volonté s’étaient rendus à Liancourt. Il se forma ainsi un ensemble assez disparate, dont on peut se faire une idée par les piquants souvenirs que B. Wilhem, qui y entra en thermidor an III, a conservés dans une notice intitulée L’élève de Liancourt, et par les Observations justificatives sur l’école nationale de Liancourt depuis son origine jusqu’à ce jour, 1er vendémiaire an VII, publiées par Crouzet lui-même. Les trois cents élèves que contenait l’établissement, mal logés, mal vêtus, mal nourris, apprenaient depuis la lecture et le calcul jusqu’aux mathématiques, jusqu’à la science des fortifications et à la tactique militaire. On y donnait aussi l’enseignement du dessin et de la musique instrumentale, dont Wilhem profita ; on avait conservé de même l’apprentissage des métiers, institué dès l’origine ; au besoin, on y gardait les troupeaux.
Sous le Consulat, Bonaparte visita plusieurs fois Liancourt ; il visita également, à Compiègne, l’un des collèges du Prytanée français, organisé militairement, mais où l’on donnait l’enseignement classique. Un jour que, dans ce collège, il avait questionné un grand nombre d’élèves sur ce qu’ils comptaient faire à leur sortie, il témoigna une vive impatience de leurs réponses. « L’Etat, dit-il, fait des frais considérables pour élever ces jeunes gens, et, quand leurs études sont terminées, ils ne sont, à l’exception des militaires, d’aucune utilité au pays ; presque tous restent à la charge de leurs familles qu’ils devraient aider. Il n’en sera plus ainsi. Je viens de visiter les grands établissements des villes du Nord et les grands ateliers de Paris. J’ai trouvé partout des contremaîtres distingués dans leur art, d’une grande habileté d’exécution, mais presque aucun qui fût en état de faire un tracé, un calcul le plu* simple de machine, de rendre ses idées par un croquis, par un mémoire. C’est une lacune dans l’industrie ; je veux la combler ici. Plus de latin, — on l’apprendra dans les lycées qui vont s’organiser, — mais le travail des métiers, avec la théorie nécessaire pour leur progrès. On formera ici d’excellents contremaîtres pour nos manufactures. «(Pompée, Rapport.)
Quelques jours après, le Moniteur du 6 ventôse an XI (25 février 1803) annonçait qu’à partir du mois suivant l’instruction donnée au collège de Compiègne aurait pour but de former de bons ouvriers et des chefs d’atelier ; l’établissement était placé sous l’autorité du ministre de l’intérieur, et il prit ultérieurement le titre d’Ecole d’arts et métiers. On y transporta les élèves de Liancourt. Trois ans après cette transformation, La Rochefoucauld, sollicité par le ministre de l’intérieur, consentit à y aller faire une enquête, et, à la suite de sa première visite, qui eut lieu le 4 juillet 1806, il reçut le titre d’inspecteur général. Il conserva ce titre lorsque l’école agrandie eut été transférée à Châlons, et il continua d’inspecter l’école, « n’acceptant aucun traitement, mais simplement le remboursement de ses frais de poste et d’hôtel » (Pompée) ; ne se bornant pas, d’ailleurs, à s’assurer du progrès des élèves, mais s’occupant d’eux à leur sortie et s’ingéniant à les placer. L’empereur, tout en appréciant ses qualités, ne le goûtait pas ; La Rochefoucauld ayant repris et développé à Liancourt ses entreprises d’industrie cotonnière, il affecta de le décorer du ruban de la Légion d’honneur comme manufacturier.
L’année 1815 appela l’attention du duc de La Rochefoucauld-Liancourt sur les écoles populaires. Il fut l’un des premiers à s’intéresser à l’introduction dans notre pays de la méthode de l’enseignement mutuel ; il traduisit, dans cette intention, l’ouvrage que Lancaster avait publié en 1810, et le fit imprimer sous ce titre : Système anglais d’instruction, ou Recueil complet des améliorations et inventions mises en pratique aux écoles royales en Angleterre (in-8°, 1815). Pendant la période des Cent-Jours, Carnot le fit entrer dans le Conseil d’industrie et de bienfaisance, dont l’une des attributions devait être la diffusion de l’enseignement populaire par le moyen de la nouvelle méthode ; et quand, à la même époque, la Société pour l’instruction élémentaire se fonda, La Rochefoucauld-Liancourt fut élu l’un des premiers pour faire partie du conseil d’administration. Quoique déjà vieux à, cette époque, nous le voyons suivre de près le mouvement de propagation des écoles mutuelles. En janvier 1817, il adresse à la Société un rapport sur l’école mutuelle établie à Beaurepaire, près de Pont-Saint -Maxence, par la baronne de Curnieu, qui en dirigeait personnellement les exercices ; lui-même établit à Liancourt deux écoles mutuelles, l’une de garçons, l’autre de filles, celle-ci tenue par des religieuses ; dans une lettre du 21 février, il constate que les élèves de ces deux écoles font des progrès sensibles ; « le règlement de Paris y est suivi religieusement ; les enfants se plaisent beaucoup à ce genre d’instruction ; on remarque déjà en eux beaucoup plus d’ordre que précédemment ; ils assistent régulièrement et en corps au service divin. Le curé leur fait le catéchisme deux fois par semaine ; le maire aide ces écoles de son influence, et tout fait espérer un succès complet ; il est même à croire que cette école aura promptement des imitateurs dans les villages voisins, niais on ne presse rien à cet égard, parce qu’en pareille matière la conviction est le meilleur moyen de succès. »
Le 5 février 1817, La Rochefoucauld-Liancourt annonça à la Société pour l’instruction élémentaire qu’un anonyme l’avait chargé de proposer un prix de 1000 fr. « pour l’ouvrage le plus propre à développer les facultés de la classe inférieure du peuple et a lui inspirer le goût de la vertu ». Ce bienfaiteur inconnu, « qu’on devine aisément, — a dit plus lard le rapporteur La Rochefoucauld-Doudeauville, — lorsqu’il est question d’un acte de bienfaisance et d’un objet d’utilité publique, » n’était autre que La Rochefoucauld-Liancourt lui-même. Le lauréat du concours fut Laurent-Pierre de Jussieu, et le livre couronné est Simon de Nantua.
La Rochefoucauld-Liancourt fut deux fois président de la Société pour l’instruction élémentaire, en 1818— 1819 et en 1821-1822, et devint ensuite président honoraire. Comme président, il eut l’occasion de prononcer, dans les assemblées générales, des discours où insistant, naturellement, sur l’importance du but poursuivi par la Société, il savait trouver de belles paroles : « L’ignorance, disait-il en 1819, mène à la dégradation. Elle l’achève en ne laissant subsister dans l’homme que ses penchants aux vices. Si celui-ci ne sait pas ce qu’est l’ordre, la morale, la justice, comment sera-t-il soumis à l’ordre public, juste envers ses semblables, capable de résister à la tentation d’un crime? Pour maintenir l’ordre, le gouvernement surveille et punit les infractions. L’instruction fait plus, elle les prévient. Entre l’homme auquel elle fait entendre ses principes et les fautes que celui-ci serait tenté de commettre, l’instruction morale interpose la conscience. » A un reproche bien souvent adressé à la méthode d’enseignement mutuel, qu’on taxait d’importation étrangère, le président de la Société pour l’instruction élémentaire répondait non sans grandeur : « On accuse cette méthode d’être d’origine anglaise, et, le croirait-on ! on lui en fait un tort, un tort impardonnable pour certains esprits. Je pourrais, comme plusieurs de mes compatriotes, revendiquer cette invention pour ma pairie, et ce ne serait pas sans fondement. Mais qu’importe cette puérile querelle? Personne, je crois, ne contestera à la France l’esprit d’invention. Elle en a un supérieur encore, celui de croire qu’elle s’honore elle-même, en mettant à profit toutes les découvertes, toutes les inventions, de quelque lieu qu’elles viennent, si elles sont utiles au bonheur des hommes. »
Il semble que la Restauration aurait dû chercher à attirer à elle la personnalité si honorable de La Rochefoucauld-Liancourt ; mais, en dehors de la rancune que Louis XVIII lui gardait, le gouvernement des Bourbons s’offusqua de son libéralisme ; on ne lui rendit point les charges auxquelles il aurait eu droit ; tout au plus n’osa-t-on point le rayer de la Chambre des pairs, où il siégeait dans l’opposition. En 1823, la cour voulut réformer, en le remplissant de ses créatures, le Conseil général des prisons dont il était membre, ainsi que de plusieurs autres administrations de bienfaisance. La Rochefoucauld-Liancourt envoya sa démission en la motivant. Quelques jours après, le 15 juillet, il recevait du ministre de l’intérieur, Corbière, la lettre suivante : « Monsieur le duc, j’ai l’honneur de vous informer que, par ordonnance en date d’hier, motivée sur la lettre que vous avez écrite, le 4 de ce mois, au préfet de police, le roi vous a retiré les fonctions d’inspecteur général du Conservatoire des arts et métiers, de membre du Conseil général des prisons, du Conseil général des manufactures, du Conseil d’agriculture, du Conseil général des hospices de Paris, et du Conseil général du département de l’Oise ». A quoi La Rochefoucauld répondit le lendemain : « Monsieur le comte, j’ai reçu la lettre que vous m’avez fait l’honneur de m écrire en date d’hier, m’annonçant que, par une ordonnance du roi, dont l’ampliation n’est pas jointe à votre lettre, Sa Majesté m’a retiré les fonctions d’inspecteur général du Conservatoire des arts et métiers, de membre du Conseil des prisons, du Conseil général des manufactures, du Conseil d’agriculture, du Conseil général des hospices de Paris et du Conseil général du département de l’Oise. Je ne sais comment les fonctions de président du Comité pour la propagation de la vaccine, que j’ai introduite en France en 1800, ont pu échapper à la bienveillance de Votre Excellence, à laquelle je me fais un devoir de les rappeler. J’ai l’honneur d’être, etc. » On ne retira pas directement à La Rochefoucauld la présidence du Comité de la vaccine, mais on supprima le comité.
Comme représailles de ces injustices, l’Académie des sciences appela clans son sein le philanthrope disgracié, et l’Académie de médecine le nomma membre de la commission qui remplaça le Comité de la vaccine. Il n’en continua pas moins, d’ailleurs, ses ouvres de bienfaisance. Son temps appartint davantage aux écoles et à la manufacture de Liancourt ; il appela Choron à enseigner le chant aux enfants et aux adultes ; enfin il introduisit et il développa à Liancourt la caisse d’épargne, et ce fut de là, dit-on, que l’institution se répandit dans toute la France.
Le 23 mars 1827, le duc de La Rochefoucauld siégeait à la Chambre des pairs, lorsqu’il fut subitement atteint de la maladie qui l’enleva quatre jours après. Le jour de ses funérailles, les anciens élèves de l’école des arts et métiers se rendirent en foule à l’église et voulurent porter sur leurs épaules le cercueil de leur bienfaiteur. On crut à une manifestation politique, et les porteurs furent tout à coup chargés par la troupe, dans la rue Saint-Honoré ; le cercueil tomba clans la boue et fut brisé ; les insignes de la pairie qui le décoraient furent souillés et foulés aux pieds. Une enquête fut commencée par la Chambre des pairs, niais on l’étouffa presque aussitôt.
Le corps du duc de La Rochefoucauld a été inhumé à Liancourt, où une statue est élevée au philanthrope et à l’éducateur.
Bibliographie. — Vie du duc de La Rochefoucauld-Liancourt (François-Alexandre-Frédéric), par Fréderic-Gaétan comte de La Rochefoucauld, son fils ; Paris, Delaforest, in-8°, 1827. — Biographie Didot. — Sainte-Beuve, Portraits littéraires, tome III. — Journal d’éducation, publié par la Société pour l’instruction élémentaire, passim.
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